La bonne musique, c’est de la haute couture. Il faut du soyeux et du rugueux, de l’uni et du coloré.
La bonne musique, c’est de la haute couture. Il faut du soyeux et du rugueux, de l’uni et du coloré, des points et des ourlets. Chez TINE POPPY, c’est tellement vrai que c’est un axiome, un principe fondateur du cheminement artistique : « Depuis petite, je voulais avoir une tenue de scène : le vêtement, c’est mon armure et mes armes ce sont mes mots ».
Tine serait donc une combattante ? Oui, mais avec subtilité. Moins adepte du poing levé que du rythme enlevé, Caroline – « Tine » est son surnom d’enfance, son « ti nom gaté », en créole de La Réunion – a connu au moins deux vies précédentes avant la chanson. D’abord gymnaste de haut niveau puis journaliste. De chacun de ces univers, elle a tiré de puissants traits de caractère : du sport une appétence pour les défis, une énergie particulière et un sens aigu de la gestion du stress ; du journalisme une haute idée des mots, un sens de l’écoute et la conviction d’être ancré dans une époque, dont la chanson se fait forcément l’écho.
Alors pourquoi « Poppy » ? Là aussi, c’est plus subtil qu’il y paraît. Oui, même si la racine originelle musicale de Tine se trouve dans le sega et le maloya de La Réunion, l’auteure-compositrice-interprète emprunte tous les chemins de la pop. Mais en plus, elle vient du Port, une commune pas tout à fait comme les autres, à La Réunion. Une ville où le mot « populaire » n’est pas neutre. Le Port, sas d’entrée des marchandises dans cette île française de l’océan Indien, c’est à la fois des dockers et des cadres, du syndicalisme, de la politique, et donc du collectif avec toutes les ambiances qui en découlent.
C’était précisément cette ambiance de « Bal Bazar » que Tine Poppy racontait dans son précédent album, cette atmosphère de musique dans un marché forain. Aujourd’hui, avec « Pop Kabar », l’ambiance est un brin plus feutrée – à peine – encore plus diverse, avec des propos plus intimes mais le même sens du partage. « Je sais, ça m’a pris du temps mais je suis devenue adulte, on dirait », rit Tine Poppy. Elle a dépassé la « séguess » du spectacle précédent – terme qui peut désigner avec ambivalence une fille un peu délurée ou la fille-au-top-que-personne-n’ose-approcher – pour affirmer plus encore une image assumée de femme créole de son temps.Ce temps, pour Tine, c’est celui de la liberté, qu’il faut chérir car elle est sans cesse en danger, et qu’il faut donc montrer, jouer, chanter, danser. D’où les escapades mélodiques, rythmiques et esthétiques incessantes, – mais la permanence de la langue créole dans les morceaux. Depuis ses débuts, il y a dix ans, Tine Poppy s’appuie sur ses fidèles musiciens : Gérald Loricourt aux claviers, Teddy Doris au trombone, Mathéo Técher ayant rejoint l’équipe lors d’une transcription du répertoire pour orchestre symphonique.
Oui, parce qu’on ne vous a pas tout raconté. Celle qui s’était lancée dans la musique sans bagage après ses deux premières vies, a vécu des accélérations soudaines : une première partie de Sandra Nkaké comme tout premier concert, trois premières parties de Vanessa Paradis, une « symphonisation »… Et n’allez pas nous parler de miracles, de chance, de bonne étoile. Non, Tine, c’est une histoire d’envies chevillées au corps : défendre une féminité déterminée, une créolité fière et diverse, une liberté d’action et de propos, une joie d’être, de faire, de partager ensemble. Et puis c’est une histoire de valeurs qui se partagent sans forcément être dites explicitement : « Le second degré, c’est peut-être bien ce que les créoles ont de plus beau », remarque Tine. On vous l’avait dit dès le début : Tine Poppy, c’est une certaine idée de l’élégance.
Ce site utilise des cookies pour son fonctionnement et analyser certaines données. Le fait de refuser leur utilisation peut avoir un effet négatif sur certaines caractéristiques et fonctions.